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Dame la Ronce et la recette du brownie aux mûres

La fin de l’été annonce la fin des vacances, au moins pour les petiots. Mais réjouissez-vous, c’est aussi la saison des mûres et des fruits de sureau noir !

Voici une double recette gourmande, chocolatée et sauvage pour se remettre de la rentrée ;)



Mais avant de vous dévoiler les secrets de ce dessert, je vous propose une petite digression et quelques anecdotes sur Dame la ronce. Je réaliserai un post plus approfondi sur le sureau noir une prochaine fois, car il y a vraiment matière. Pour ceux qui voudraient réaliser la recette complète mais ne connaissent pas bien le sureau, je vous ai tout de même préparé dans la foulée, un court article sur l’identification du sureau noir. Vous pourrez ainsi cueillir les fruits sans risque de confusion et préparer le coulis en toute sécurité.



LA RONCE, LA MAL-AIMEE

La ronce est ce qu’on appelle en botanique un arbrisseau sarmenteux, ce qui signifie que c’est une plante ligneuse (on considère que la ronce produit du bois) dont les longues tiges souples s’arquent comme des fouets et peuvent êtres grimpantes comme des sarments.



Rien qu’en France il existe une cinquantaine d’espèces différentes de ronces. Certaines sont rares et caractéristiques de certains milieux, d’autres plus courantes (comme la ronce commune, Rubus fruticosus). Il n’est pas toujours facile de distinguer les espèces entre elles, mais peut-importe pour les gourmands, toutes portent des fruits comestibles !


Rubus saxatilis
Rubus caesius

Les ronces étant couvertes d’aiguillons - tout le monde en a déjà fait les frais - elles ont longtemps été utilisées pour leur rôle protecteur. Elles étaient implantées en complément de fortifications en pierre, décuplant leur rôle défensif en cas d’attaque guerrière. On se servait aussi des haies de ronces, associées au prunellier (Prunus spinosa), à l’aubépine (Crataegus sp.) et bien d’autres espèces pour garder le bétail, offrant par la même occasion un complément de nourriture bénéfique pour les animaux. La plupart des races rustiques de chèvres et de moutons en consomment les jeunes pousses, riches en tanins, aux propriétés antiparasitaires naturelles.


Une haie de ronce infranchissable pour les troupeaux
Ronce et prunellier (prunus spinosa)

La ronce était aussi appréciée pour ses qualités médicinales, ainsi qu’en vannerie pour la confection de nombreux objets.


A part pour un usage alimentaire, qui demeure assez marginal, toutes ces pratiques ont disparu. La ronce, en plus d’être épineuse, est une plante plus que vigoureuse qui prolifère de manière exponentielle. Ainsi la ronce est devenue la bête noire des agriculteurs et des amoureux du béton vert. Considérée comme inutile et envahissante, elle est le symbole même de la friche. Dans l’imaginaire collectif la ronce a une connotation fortement négative, elle évoque une terre laissée à l'abandon, offrant refuge à toutes sorte de “vermines” (dans ma campagne tourangelle, c’est ainsi que les anciens qualifient les animaux sauvages qu’ils jugent indésirables : blaireaux, renards, serpents…


Verger abandonné


LA MERE DES CHÊNES


Heureusement une nouvelle génération d’influenceurs s’intéressent au rôle écologique de la ronce et tentent de lui redonner une juste place aussi bien dans leurs jardins que dans la tête des hommes (Fabrice Desjours à la Forêt Gourmande, Natacha Leroux de l’association Permaforêt ou encore Eric Lenoir et son Jardin punk pour n’en citer que quelques uns).

→ cf quelques références en bas de cet article pour approfondir la question.


Retenez une chose simple, la ronce annonce et prépare la forêt.

Sous nos latitudes, la forêt est ce qu’on appelle un “climax”, un système écologique où le sol et les végétaux sont dans une sorte d’équilibre stable et durable. Pour en arriver là, il a fallu toute une succession écologique, c'est-à-dire différentes étapes, avec des formes végétales différentes. La ronce est une plante pionnière qui assure la transition entre la prairie et la forêt. Elle allège, ombrage et ameublit le sol, favorisant ainsi la germination et l’implantation des jeunes arbres forestiers, dont peu peuvent pousser dans les conditions rudes d’une prairie, soumise à l’influence du vent, du soleil, et de la concurrence avec les graminées. La ronce va aussi protéger les jeunes arbres des prédateurs, ses aiguilles rudes et ses formes impénétrables dissuadant chevreuils et autres animaux sauvages de venir grignoter les jeunes feuilles d’arbre.



Cette plante pionnière pousse dans tout type de sol et est bourrée d’hormones de croissance. Certains diront qu’une fois la ronce implantée, inutile de vouloir l’exterminer, elle repoussera toujours. Il faut juste apprendre à vivre avec et la domestiquer, comme faisaient les anciens. Et bonne nouvelle pour les amoureux des potagers et des vergers, la ronce abrite tout un cortège d’insectes, d’oiseaux, de petits mammifères qui viendront polliniser et réguler les ravageurs des cultures.


LES MÛRES, FAUSSES BAIES

(photo gros plan mûre)


Petit focus sur le fruit qui nous intéresse tant et au passage un peu de jargon botanique. Dans le langage courant les mûres sont souvent qualifiées de “baies”. Or en botanique une baie est un fruit charnu issu d’une transformation complète de l’ovaire. Elle contient généralement plusieurs graines, que l’on nomme aussi pépins ! Les groseilles, le raisin, les tomates sont de vraies baies. (En vrai c’est un chouilla plus compliqué car il existe des baies avec un seul pépin, comme l’avocat !)



Et pour la mûre et les framboises ? Si l’on regarde de près, une mûre est constituée de plusieurs petits “globules juteux” agglomérés. Chaque “globule” est en fait une toute petite drupe (drupéole). Une drupe c’est comme une pêche ou une cerise : il y a le fruits charnu que l’on consomme, puis il y a la partie ligneuse, le noyau.


Fruit charnu et noyau sont tous deux issues de l’ovaire, et forment ensemble le fruit botaniquement parlant. Si l’on casse le noyau, à l’intérieur se trouve la graine (l’amandon). Chaque “grobule” de la mûre contient donc un mini noyau très rigide qui contient une seule graine. Et c’est celui là qui nous embête et que l’on cherche à évacuer lorsque l’on prépare la gelée.



Polydrupe ! Ce n’est pas une insulte mais le terme botanique pour désigner une mûre ! Mais je vous l’accorde c’est bien moins poétique qu'une baie ou qu’un bouquet de drupéoles ;)


Ce sont les tiges de la seconde année qui portent nos polydrupes, enfin nos mûres, vous avez compris.



Elles sont riches en vitamine C, vitamine B, provitamine A, sels minéraux. Elles sont bonnes pour la santé et améliorent le fonctionnement général de l’organisme.


A noter que ce sont les feuilles, riches en tanins (jusqu'à 15%) qui sont principalement utilisées pour soigner les maux de gorge, les toux et les diarrhées. Fruits et feuilles peuvent avoir un effet combiné intéressant.



Avec les mûres on peut réaliser une multitude de desserts. On peut les manger aussi bien crues que cuites. Crues, on les appréciera en accompagnement d’un yaourt, en jus, posés sur un fond de tarte type pâte sablée, dans un muesli. Mon coup de cœur je les mets en déco sur une crème dessert à l’acacia (fleurs de robinier). L’an passé j’ai réalisé une sorte de kimchi de chou rouge aux mûres qui avait beaucoup plu.



En cuisson on réalise une multitude de desserts, laissez place à votre imagination : tartes, crumbles, clafoutis, muffins, mûrier, cheese cake... On confectionne aussi des gelées, confitures, sirops, coulis pour pouvoir apprécier son arôme toute l’année. Additionnées à d’autres fruits de saison, les mûres sont aussi délicieuses en compote.


Enfin on peut préparer des vins apéritifs ou médicinaux, de la crème (comme la crème de cassis mais à la mûre), du vinaigre à la mûre…



BROWNIE AUX MÛRES, LA RECETTE


Ingrédients :

  • 160g de mûres

  • 120g de chocolat 70% de cacao

  • 100g de beurre

  • 60g de farine

  • 60g de sucre

  • 2 oeufs

  • 1 pincée de sel


Préparation :

Faire fondre le chocolat au bain marie avec le beurre.

Mélanger les œufs et le sucre.

Ajouter la farine, le sucre et le sel. Mélanger.

Ajouter le chocolat fondu. Mélanger.

Incorporer les mûres.

Verser dans un plat beurré.

Cuisson 25min à 180°c. Planter une pointe de couteau au cœur du gâteau pour vérifier la cuisson.



COULIS DE SUREAU NOIR


Conseil de cueillette :

  • Assurez-vous d’avoir cueilli la bonne plante. Rendez-vous sur l’article dédié à l’identification du sureau noir si besoin.

  • Sélectionner des corymbes bien mûres, les fruits immatures étant toxiques, surtout crus.

  • Les fruits de sureau noir doivent être consommés de préférence cuits. On peut en consommer de petites quantités crus (en déco), avec modération. En effet les fruits peuvent être émétiques et purgatifs (provoquent vomissements et diarrhées).

  • Égrainer les corymbes à l’aide d’une fourchette fonctionne assez bien.



Ingrédients :

  • 500g de fruits de sureau (après égrenage des corymbes)

  • 100g de sucre


Préparation :

Cuire quelques minutes les fruits, puis les passer au presse purée pour éliminer les tout petits noyaux. (Pour ma part, je récupère environ 360g de pulpe)

Ajouter le sucre et porter à ébullition. Laisser cuire environ 5 à 10 min à petits bouillons. avant de remplir des bocaux bien nettoyés.

On peut les conserver quelques semaines au réfrigérateur.

On peut aussi congeler le coulis pour un usage ultérieur, dans ce cas, remplir les pots aux 3/4. Il est sans doute possible de les pasteuriser mais je n’ai pas fait de test de conservation.


Ce coulis se marie très bien avec le chocolat. Il accompagne à merveille le brownie aux mûres.



Vous voulez apprendre à identifier les plantes sauvages et à les cuisiner ? Rendez-vous au détour d'une sortie ou au court d'un stage pour apprendre à cueillir et cuisiner les plantes de saison ;)


Bibliographie :

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