QUI SONT LES APIACEES ?
La famille des Apiacées, nommée autrefois Ombellifères en raison de leurs inflorescences caractéristiques en forme de coupole, regroupe un peu moins de 200 espèces sauvages rien qu’en France métropolitaine. Vous connaissez certainement des potagères et des aromatiques qui font partie de la famille, telles que la carotte, le panais, le fenouil, le persil, et bien d’autres... Attention certains membres sont moins fréquentables, comme la grande ciguë (Conium maculatum), l’oenanthe safranée (Oenanthe crocata) ou la férule fétide (Ferula foetida) qui sont mortelles.
DES FRUITS COMESTIBLES ?
Chez les Apiacées alimentaires, on consomme parfois la racine (panais, carotte), d’autre fois les feuilles ou les tiges (berce, persil, cerfeuil, angélique), mais également leurs semences, qui vont nous intéresser plus particulièrement à cette saison.
Dans le langage courant on parle généralement de “grains” ou de “graines”. Sachez que les botanistes les considèrent, dans ce cas précis, comme des fruits secs, qu’ils nomment akènes. Car chez les Apiacées, les véritables graines sont à l’intérieur du fruit, protégées d’une enveloppe rigide. Chaque fleur d’apiacée donne donc un diakène, c'est-à-dire deux akènes assemblés. L’ombelle de fleurs donne donc une ombelle de diakènes. Ces fruits sont souvent très aromatiques. Là encore vous en connaissez. Le cumin, l’anis, les grains de coriandre, le carvi… bingo, ce sont des Apiacées !
LES APIACEES SAUVAGES LES PLUS COURANTES
En plaine, la berce spondyle (Heracleum sphondylium) fait partie des sauvageonnes les plus courantes et intéressantes. On la rencontre dans presque toutes mes sorties et stages en Touraine. Ses semences plates représentent un condiment puissant. Fraîches, leur saveur rappelle le piquant du gingembre et le fruité des agrumes, notes étonnantes de mandarine et de noix de coco, avec une certaine amertume, comme dans le ziste des agrumes (peau blanche sous le zeste).
Je les emploie pour réaliser des liqueurs ou boissons apéritives, mais aussi pour rehausser un gaspacho ou parfumer une panna cotta. Il faut les doser avec parcimonie tellement leur arôme est puissant. L’association avec le chocolat est ma préférée. Très gourmande, elle apporte une note fraîche et vive. Vous pouvez donc parfumer une mousse, un gâteau ou encore une ganache au chocolat avec les fruits de berce. Les fruits secs sont plus doux et leur arôme rappelle celui des “grains” de coriandre. Après les avoir broyés, je les utilise pour parfumer un tajine, un houmous, une salade de lentilles ou encore des galettes végétales.
Le panais sauvage (Pastinaca sativa) peut être confondu avec la berce, sans danger puisque toutes ses parties sont tout autant comestibles. Ses semences pourront être employées de la même manière. Attention les deux plantes sont photosensibilisantes par contact de la sève sur la peau puis exposition au soleil. Par une météo ensoleillée, protégez-vous lors de vos cueillettes et lavez-vous bien les main après.
La carotte sauvage (Daucus carota) couvre actuellement les prairies et les chemins de ses gracieuses ombelles blanches. Ses fruits dégagent au froissement un parfum camphré et fruité, évoquant la poire et les agrumes, là encore. Le goût, quant à lui, se rapproche de celui des grains de coriandre, du carvi, voire de l’anis. Les semences de carottes s’utilisent fraîches ou séchées pour relever des plats salés tels que des céréales (riz, quinoa, boulgour), des pommes de terre, des poêlés de légumes, du fromage frais, mais également pour parfumer les desserts, comme des crèmes, des salades de fruits, des biscuits, des desserts chocolatés. Je vous parle plus en détails de la carotte sauvage ci-dessous pour que vous puissiez la reconnaître et la cueillir en toute sécurité.
Enfin, le fenouil sauvage (Foeniculum vulgare), présente des petites semences au parfum sucré et anisé. Elles sont délicieuses en tisanes et permettent de réaliser des boissons apéritives très rafraîchissantes, mais aussi de relever des plats salés, comme des sauces, des poissons, des dhals ou des currys de légumes. On peut aussi les utiliser en pâtisserie pour réaliser de délicieux biscuits. Le fenouil se rencontre dans les lieux secs et ensoleillés, dans toute la France mais plus particulièrement dans le sud et sur le littoral atlantique.
LES EPICES DU LITTORAL
Si vous vivez près de la côte Atlantique ou que vous vous y rendez parfois, vous aurez l’occasion de côtoyer le maceron (Smyrnium olusatrum). Son histoire est depuis de nombreux siècles liée à l’homme et à la mer. Riche en vitamines et minéraux, il possède de fortes propriétés anti-scorbutiques. Les marins, qui voyageaient pendant de longues semaines et dont l’alimentation était très pauvre, avaient l’habitude d’en disperser les graines lors de leurs escales sur tout le littoral et sur les îles à proximité. Ainsi, ils pouvaient facilement s’approvisionner en maceron frais lors de leurs expéditions.
A maturité, son fruit qui prend la forme d’un grain noir renflé et dur, en demi-lune, est commercialisé de nos jours sous le nom de “poivre des marais”. Cette épice offre en bouche une symphonie de saveurs, avec des notes florales, boisées, épicées et truffées. Elle apporte aux plats une saveur aromatique poivrée mais non piquante. Il accompagne à merveille poissons, pommes de terre ou chocolat. L’hiver dernier j’ai testé une recette de chocolats au poivre des marais et à la fleur de sel qui a fait fureur !
La côte rocheuse, y compris en méditerranée, est le royaume de la criste marine (Crithmum maritimum), qui s'épanouit pleinement dans les embruns. Ses fruits ont une saveur puissante, rappelant ceux du fenouil et du cumin, avec une note légèrement fumée et une saveur iodée, du fait de son exposition. Comme chez ses cousines on retrouve des notes d’agrumes, ici plutôt citronnées, ce qui en fait une épice idéale pour accompagner les poissons, les fruits de mer, les algues, les pommes de terre et le fromage. Je l’utilise souvent pour parfumer les salades de pommes de terre ou les taboulés. Sa saveur aromatique, proche de l’anis, se prête également aux desserts, notamment les préparations à base de fruits, les pâtisseries, entremets chocolatés. Attention, la cueillette de la criste est réglementée dans certaines régions. Le littoral est un milieu sensible, respectez-le!
LES EPICES DE MONTAGNE
Enfin si vous êtes plutôt montagne, vous ne perdrez pas au change avec la myrrhe odorante (Myrrhis odorata) et le cumin des Alpes (Carum carvi)
La myrrhe odorante, également nommée cerfeuil musqué, possède le parfum de l’anis et une saveur sucrée prononcée. L’essentiel de son utilisation en cuisine se fait donc dans les plats sucrés ou les liqueurs. Véritable sucre végétal, on peut l’utiliser comme édulcorant afin de réduire les quantités de sucre utilisées pour préparer les desserts. Ses fruits encore tendres et croquants sont consommés comme de petits bonbons anisés. Les fruits secs réduits en poudre relèvent à merveille une tarte aux fruits.
La saveur du carvi rappelle clairement celle du cumin. Il est traditionnellement utilisé pour parfumer des spécialités régionales, telles que le pain de seigle allemand “pumpernickel”, des fromages, comme le gouda ou le munster, la choucroute… Il trouve sa place dans les plats salés mijotés ou encore le houmous.
Voici donc un bel échantillon d’épices sauvages que vous pouvez rencontrer durant l’été. Pour ma part, je cueille et je sèche certaines d’entre elles afin de les utiliser dans les recettes de l’herbandine. Vous les retrouvez dans ma gamme de condiments sauvages, en mélange avec d’autres plantes, du sel ou des graines toastées.
Je propose également mes épices sauvages aux restaurants et professionnels des métiers de bouche.
Enfin nous utilisons les épices sauvages toute l’année, durant les ateliers cuisine, pour préparer des recettes délicieuses et originales.
Et pour finir le lien vers l’une de mes fameuses recettes de pain aux épices sauvages.
Si vous voulez apprendre à reconnaître les plantes à épices, je vous rappelle que notre formation des 4 saisons de la cueillette sauvage est itinérante. Elle permet de se familiariser avec différents milieux naturels, de la montagne au littoral, en passant par la Vallée du Cher, et d’apprendre à reconnaître de nombreuses plantes, comme celles évoquées dans cet article.
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